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Décision de confiscation par une juridiction étrangère

Edouard Steru, Analyses et jurisprudences


Décision de confiscation par une juridiction étrangère

Cass. Crim. 28 mai 2015, n°14-83612, publié au Bulletin


La Cour d’appel saisie d’une demande d’exécution d’une décision de confiscation sur le fondement de la Convention de Strasbourg du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime a fait application des règles de procédure définies aux articles 713-12 à 713-35 du code de procédure pénale. Ces dispositions sont insérées sous la section 1 (du chapitre sur la coopération internationale au fins d’exécution des décisions de confiscation) intitulée : "de la transmission et de l’exécution des décisions de confiscation en application de la décision-cadre du Conseil de l’Union Européenne du 6 octobre 2006 ". La chambre criminelle censure l’arrêt de la Cour d’appel qui aurait dû examiner cette demande au regard de la procédure définie aux articles 713-36 à 713-41 du Code de procédure pénale à défaut de transposition par le Royaume-Uni de la décision-cadre du Conseil de l’Union européenne du 6 octobre 2006 relative à l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions de confiscation en droit interne. Cette décision publiée au Bulletin Criminel est l’occasion d’évoquer brièvement les deux régimes d’exécution des décisions de confiscation de biens prononcées par les juridictions étrangères. En l’absence de convention internationale en disposant autrement ou de transposition de l’accord-cadre précité, l’article 713-37 CPP prévoit que la confiscation est refusée :


  • si les faits à l’origine de la demande ne sont pas constitutifs d’une infraction selon la loi française ;

  • si les biens ne sont pas susceptibles d’être confisqués selon la loi française ;

  • si la décision de confiscation n’a pas été prononcée dans des conditions offrant des garanties suffisantes de protection des libertés individuelles et des droits de la

défense ;

  • si la décision de confiscation poursuit un but discriminatoire ou politique

  • si le ministère public français avait décidé de ne pas engager de poursuites ou si les faits à raison desquels la confiscation a été prononcée a fait l’objet d’un jugement

définitif des autorités française (à condition s’il y a eu condamnation que la peine ait été ou soit en cours d’exécution)

  • si elle porte sur une infraction politique.


Les autorités française disposent également d’une marge d’appréciation importante en cas d’application du régime de reconnaissance mutuelle prévu aux articles 713-12 à 713-35 du CPP. Lorsque la transmission et l’exécution des décisions de confiscation est réalisée en application de la décision-cadre de l’UE du 6 octobre 2006, les motifs de refus obligatoires prévus par l’article 713-20 du CPP sont les suivants : « 1° Si le certificat n’est pas produit, s’il est établi de manière incomplète ou s’il ne correspond manifestement pas à la décision de confiscation ; 2° Si une immunité y fait obstacle ou si le bien, par sa nature ou son statut, ne peut faire l’objet d’une confiscation selon la loi française ; 3° Si la décision de confiscation se fonde sur des infractions pour lesquelles la personne à l’encontre de laquelle la décision a été rendue a déjà été jugée définitivement par les autorités judiciaires françaises ou par celles d’un Etat autre que l’Etat d’émission, à condition, en cas de condamnation, que la peine ait été exécutée, soit en cours d’exécution ou ne puisse plus être mise à exécution selon les lois de l’Etat de condamnation ; 4° S’il est établi que la décision de confiscation a été émise dans le but de poursuivre ou de condamner une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de son origine ethnique, de sa nationalité, de sa langue, de ses opinions politiques ou de son orientation ou identité sexuelle ou que l’exécution de ladite décision peut porter atteinte à la situation de cette personne pour l’une de ces raisons ; 5° Si la confiscation est fondée sur des faits qui ne constituent pas des infractions permettant, selon la loi française, d’ordonner une telle mesure ; 6° Si les droits d’un tiers de bonne foi rendent impossible, selon la loi française, l’exécution de la décision de confiscation ; 7° Si, selon les indications portées dans le certificat, l’intéressé n’a pas comparu en personne lors du procès à l’issue duquel la confiscation a été prononcée sauf si, selon ces indications, il se trouve dans l’un des cas prévus aux 1° à 3° de l’article 695-22-1 ; 8° Si les faits sur lesquels la décision est fondée relèvent de la compétence des juridictions françaises et que la décision de confiscation est prescrite au regard de la loi française. Toutefois, le motif de refus prévu au 5° n’est pas opposable lorsque la décision de confiscation concerne une infraction qui, en vertu de la loi de l’Etat d’émission, entre dans l’une des catégories d’infractions mentionnées aux troisième à trente-quatrième alinéas de l’article 695-23 et y est punie d’une peine privative de liberté d’une durée égale ou supérieure à trois ans d’emprisonnement. L’exécution d’une décision de confiscation est également refusée, le cas échéant partiellement, si la décision de confiscation se fonde sur le motif visé au 3° de l’article 713-1. Dans ce cas, il est fait application du cinquième alinéa de l’article 713-24. » A ces motifs de refus s’ajoutent ceux de l’article 713-22 CPP qui sont facultatifs : « L’exécution d’une décision de confiscation peut être refusée dans l’un des cas suivants : 1° Si la décision de confiscation est fondée sur une procédure pénale relative à des infractions commises en tout ou partie sur le territoire de la République ; 2° Si la décision de confiscation est fondée sur une procédure pénale relative à des infractions qui ont été commises hors du territoire de l’Etat d’émission et que la loi française n’autorise pas la poursuite de ces faits lorsqu’ils sont commis hors du territoire de la République.» Mais dans ce cas, la coopération est plus aboutie. L’article 713-19 CPP dispose ainsi que « Lorsque le tribunal correctionnel envisage de refuser l’exécution d’une décision de confiscation sur le fondement de l’un des motifs visés aux 1°, 3° et 7° de l’article 713-20 ou à l’article 713-22, il en avise, avant de statuer, l’autorité compétente de l’Etat d’émission et la met à même de produire ses observations. » Les régimes ne diffèrent pas en revanche sur le partage des produits de la vente des biens confisqués (article 713-32 CPP et article 713-40 CPP). L’exécution sur le territoire français d’une décision de confiscation émanant d’une juridiction étrangère entraîne en principe (sauf convention contraire) transfert à l’Etat français de la propriété des biens confisqués. En cas de vente des biens, si le produit de la vente (déduction faite des frais) est supérieur à 10 000 euros, l’Etat français conserve la moitié des sommes d’argent recouvrées. Il en est de même si la décision étrangère prévoit la confiscation en valeur.

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